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La spirale infernale continue

La nutrition animale souffre une nouvelle fois des crises de l'élevage. Outre la fin des quotas laitiers, la production porcine perd des effectifs malgré l'appel de la Chine et l'aviculture peine encore, sans compter le traumatisme de l'influenza aviaire. Résultat : une baisse attendue de près de 5 % cette année.

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La France va probablement perdre cette année un million de tonnes de production, repassant ainsi sous la barre des 21 Mt d'aliments pour animaux qu'elle avait pourtant durablement franchie en 1994. Avec 20,12 Mt et - 4,8 %, la production nationale retourne donc vingt-trois ans en arrière, alors qu'elle parvenait depuis 2008 à « tenir » un peu au-dessus de 21 Mt. Toutes les espèces contribuent à cette baisse qui combine une tendance structurelle à la contraction avec des conjonctures particulières.

Ainsi, l'aviculture est en recul de 4 %. Elle a perdu plus de 355 000 t dont 200 000 t pour les palmipèdes dans le Sud-Ouest, en raison du vide sanitaire imposé par la crise de l'influenza aviaire. La pondeuse se porte mieux, à quasi-stabilité, mais les opérateurs s'inquiètent de l'accélération de la tendance vers des oeufs alternatifs et, donc de la capacité des opérateurs à s'adapter à cette évolution. Sur la volaille de chair, les conditions de prix ont également pesé à l'export. Son plus gros volume, le poulet congelé, avait connu une belle reprise d'un peu plus de 3 % en 2015 (212 048 t), mais connaît un vrai coup d'arrêt cette année (194 000 t sur douze mois glissants de septembre 2015 à août 2016). Après la chute du début d'année liée aux prix agressifs des grands exportateurs mondiaux sur nos marchés pays tiers, la reprise s'est toutefois fait sentir à partir d'avril. Sur le marché intérieur qu'ils veulent reconquérir, soutenu par l'étiquetage de l'origine, la restructuration des opérateurs de l'aviculture française est également bien engagée : LDC a repris les outils du groupe Avril l'an dernier, Terrena a racheté Doux et son Père Dodu cette année. La coop vient d'ailleurs d'annoncer la réorganisation de son pôle volaille sous le nom de Galliance.

Les volumes d'aliments pour porcs devraient aussi enregistrer une baisse de 3,3 % en 2016. « Malgré la récente embellie que connaît la filière, la crise a laissé des traces sur les capacités de production que l'on retrouve encore aujourd'hui dans les consommations d'aliments », analysent les syndicats Coop de France Nutrition animale et Snia.

Vers la fin du printemps chinois

La Chine est en effet arrivée en force sur le marché international en début d'année et la meilleure tenue des cours a redonné des marges aux éleveurs. Les fabricants d'aliments l'ont senti avec, enfin, une diminution des encours. Mais cet appel d'air semble s'essouffler, avec dès la mi-octobre, une nouvelle chute des cours. « Eurostat vient de publier les résultats du 8e mois de 2016 : ils confirment une moindre demande chinoise de porcs européens, après le pic atteint en juin, tout en maintenant un niveau exceptionnel de + 96,8 % par rapport à la même période de 2015 », confirme le Marché du porc Breton le 17 octobre. Au final, malgré la chance qu'a constitué le « printemps chinois », la production semble tendre vers une relative stabilité avec un décrochage annoncé sur le dernier trimestre de l'année. De plus, la demande des pays tiers étant ralentie depuis l'été, les grands producteurs européens que sont l'Allemagne et l'Espagne vont probablement se retourner sur le marché communautaire. Fragilisée, la position française pourrait donc redevenir délicate.

Mais c'est bien le secteur des ruminants qui souffre le plus, repassant avec - 9,1 % sous les 5 Mt (4,8 Mt). Il rétrograde à la troisième position, derrière les porcs. La baisse est particulièrement sensible en lait (- 12,3 %), en lien direct avec la crise laitière, la surproduction européenne plombant les prix pour les éleveurs depuis plus de dix-huit mois. Toutefois, les experts prévoient un retournement de conjoncture qui devrait stopper cette spirale infernale.

DOSSIER RÉALISÉ PAR YANNE BOLOH

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